Adapter son langage

ADAPTER LE LANGAGE HYPNOTIQUE AUX JEUNES CLIENTS.

Le plus souvent, pour les enfants, les discours et les méthodes exploités doivent être plus « sensoriels qu’intellectuels ». Il est indispensable de se servir d’un langage semblable à celui du jeune client pour répondre et faire les suggestions. En d’autres termes, lui parler comme lui vous parle (en privilégiant images et ressentis).

Vous verrez ci-après des exemples de suggestions qui pourront vous aider à générer votre discours hypnotique. Et afin d’optimiser ce dernier, n’hésitez pas à exploiter les éléments de réponse de votre entretien avec votre jeune client.

Les enfants ont la particularité de disposer d’une excellente capacité d’imagination. Plus ils sont jeunes plus ils s’expriment avec des métaphores ou des images. Il n’est pas rare que les solutions et les moyens permettant de mettre en place le changement viennent d’eux-mêmes. L’enfant vous les exprimera, sans le savoir, lors de votre conversation. Il suffira par la suite de reprendre les propos reçus et de les adapter à votre discours.

Les modèles de suggestions.

Suggestion par transe partielle.

La transe partielle est une transe « normale » dédiée à une partie bien définie du corps du client. Il vous offre de nombreuses possibilités. Vous pouvez par exemple hypnotiser le corps entier, mais sans la tête, ou uniquement les doigts, la peau, le ventre, ou encore les émotions. Afin d’accéder à la transe partielle, il est nécessaire de se servir de suggestions directes : « J’aimerais m’adresser à ton petit doigt… le gauche… et uniquement à ton petit doigt… Le gauche va réagir à ma suggestion… » « J’invite ton corps et ton esprit à maintenir ta peau bien éveillée pendant qu’eux dorment… J’aimerais qu’ils la gardent éveillée afin que je puisse lui suggérer de… »

Suggestion par métaphores de reformulation ou thérapeutiques.

Une partie du cerveau dénommée « cerveau droit » permet de recenser les capacités de l’imagination. Pour pouvoir accéder à cette partie, il est nécessaire de se servir de la métaphore. On peut avoir plusieurs types de métaphores, de la simple phrase aux histoires. Quoiqu’il en soit, tous contiennent une signification cachée (suggestion hypnotique). Sa structure va aider l’enfant à visualiser sous la forme d’un personnage, un enfant de son âge, un animal, une fée, un dragon, etc. et de s’orienter vers le changement.

Structure d’une métaphore.

À chaque fois que l’enfant est confronté à une situation spécifique, il est indispensable de trouver une métaphore adaptée à celle-ci. Deux modèles de métaphore existent : la métaphore de reformulation et la métaphore thérapeutique. La métaphore de reformulation est le fait de se servir d’un langage similaire à celui de l’enfant et d’y joindre une métaphore de ce qu’il est en train de vivre. On peut utiliser un mot de liaison tel que « comme ». La métaphore thérapeutique, quant à elle, est entièrement métaphorique.

Pour une meilleure efficacité, n’hésitez pas à recourir à des termes tels que « c’est comme si… » ou « c’est comme… ». Il est indispensable de décrire un événement qui représente la métaphore choisie pour la suggestion. Vous avez également la possibilité d’exploiter les images dont vous vous êtes servis durant l’anamnèse, ou encore des éléments/réalités de l’environnement de votre jeune client :

· Se baigner (piscine)

· Prendre l’avion

· Pratiquer un sport

· Tondre la pelouse

· Jouer aux jeux vidéo

· Télécharger des applications

L’idée est d’exploiter ce que l’enfant sait faire, et de l’orienter vers d’autres compétences qui le permettront de dénouer son problème.

Métaphores de reformulation

« Tu te sens léger(ère) comme une plume qui s’élève dans les airs… »

« C’est comme si tu soulevais un sac de plus en plus lourd, et que tu décidais de voir à l’intérieur pour connaître le contenu… »

Métaphores thérapeutiques

« … L’heure de la récréation est arrivée dans le potager, et les légumes sont heureux d’en profiter… ils restent immobiles comme ils sont bien plantés dans la terre… ils sont plantés pour bénéficier de tout ce que la nature peut leur apporter… Pour eux, les racines sont un peu comme leurs jambes… »

Suggestion par allégorie (histoires et contes)

Lire une histoire peut aider à apaiser un enfant et apprivoiser toute son attention. Ces histoires vont lui permettre de se projeter et de s’identifier plus naturellement et plus facilement aux personnages. On peut alors se servir des allégories pour faire naître le sommeil hypnotique chez l’enfant. On peut également s’en servir dans un discours hypnotique en les personnalisant avec des suggestions hypnotiques.

Création d’une allégorie

Servez-vous de différents personnages : animaux, insectes, images, sorciers, fées, etc. et construisez des conversations qui les mettent en évidence. Joignez l’enfant au dialogue en le « transformant » en l’un de ces personnages.

Le fil conducteur de l’allégorie doit aboutir à une remise en contexte du trouble, à l’ouverture des solutions et à un aboutissement satisfaisant.

Si l’inspiration vous manque, n’hésitez pas à faire appel aux contes pour enfants (La Fontaine, Walt Disney etc). A partir des images proposées, ajoutez les images de l’enfant, des suggestions positives et un dénouement heureux.

Suggestion par visualisation

Visualiser un film peut être particulièrement efficace pour traiter les phobies simples.

Il sera d’abord nécessaire d’estimer le degré de peur ressenti par l’enfant lorsqu’il croit être confronté à l’objet de sa phobie ou de sa peur. Evaluez la peur sur une échelle de un à dix.

Dans un premier temps, amenez l’enfant à imaginer qu’il se trouve dans une bulle brillante. Rassurez-le que cette bulle va le protéger. N’hésitez pas à lui apporter des détails sur la bulle, ou l’inviter à la décrire pour vous.

Puis dîtes-lui de s’approcher d’un grand écran qui est presque aussi grand que le mur, tout en restant dans la bulle.

Dîtes-lui de mettre en marche ce grand écran à l’aide d’une télécommande. Il devra presser sur le bouton « marche » et choisir une chaîne. Un petit film va être diffusé. Dans ce film, il se verra confronté à l’objet de sa phobie, lors d’une situation de la vie de tous les jours. 

Précision : Rassurez l’enfant sur le fait que sa bulle le protège. Il est indispensable qu’il se sente en sécurité.

Amenez-le à « s’amuser » avec les images du film, en les faisant avancer, reculer ou les mettre en pause. Dès que l’enfant se sent prêt, invitez-le à s’avancer peu à peu vers l’écran. Lorsqu’il est assez proche, dîtes-lui de s’introduire dans le film et de devenir un acteur à part entière de celui-ci. Suggérez-lui de sortir ou non de sa bulle en vous basant sur l’analyse de son comportement.

Ensuite, il peut quitter le film, sortir de l’écran et se percevoir. Il peut percevoir son comportement positif vis-à-vis de l’objet de sa phobie.

N’hésitez pas à lui demander son ressenti actuel lorsqu’il fait face à l’objet de sa phobie ou de sa peur. Dîtes-lui d’estimer ce qu’il ressent sur une échelle de un à dix. Vous pouvez recommencer l’exercice si vous le jugez nécessaire.

L’étoile:

L’idée est d’amener l’enfant à visualiser une grande étoile sur le sol, de l’inviter à s’en approcher et de s’y installer.

Mais avant de commencer, il vous sera nécessaire de définir la particularité de l’étoile : c’est l’étoile du sommeil et des beaux rêves, l’étoile de la concentration, du calme, etc. 

Il est nécessaire d’expliquer à l’enfant qu’il aura un pouvoir semblable à celui de l’étoile aussi longtemps qu’il se trouvera sur elle.

Une autre méthode est de coller une étoile en papier au plafond de la pièce et d’inviter l’enfant à y focaliser son regard. Suggérez-lui que cette étoile va grandir de plus en plus jusqu’à pouvoir l’entourer.

Les couleurs :

Invitez l’enfant à méditer sur ce qui lui pose problème. Demandez-lui de vous donner un chiffre entre un et dix en fonction de l’intensité du trouble.

Puis dîtes-lui de réfléchir encore à ce problème (vous pouvez ajouter des éléments si vous le souhaitez) et suggérez-lui d’enduire ses pensées et l’intérieur des murs de son esprit avec une couleur que vous allez nommer (la troisième couleur choisie dans l’anamnèse) jusqu’à ce qu’il n’y ait plus que cette couleur.

Renouvelez l’expérience avec la deuxième couleur choisie, et enfin terminez avec la première couleur choisie (sa couleur préférée).

Dîtes-lui de réfléchir encore une fois à ce qui le trouble, et d’en estimer le degré en vous donnant un chiffre de un à dix. Vous pouvez recommencer l’expérience si vous le jugez nécessaire.

Suggestion d’extériorisation 

Les enfants disposent d’une capacité de visualisation élevée. N’hésitez pas à exploiter cette capacité pour lui faire extérioriser les soucis de douleur ainsi que les émotions inhibées. Pour ce faire, il est nécessaire de se servir des modes sensoriels : visuel, auditif et kinesthésique (éventuellement vous pouvez ajouter les sens gustatif et olfactif si besoin).

L’enfant devra dans un premier temps vous montrer la partie du corps qui est source de l’inconfort (douleur, émotion ou sentiment, pensée récurrente etc.).

Demandez-lui de décrire la couleur de ce trouble. Puis invitez-le à allonger le bras devant lui et à visualiser le fait que ce qui le trouble s’achemine le long de son bras pour aboutir dans sa main. Dès cet instant, sa main lui paraîtra plus pesante à cause de la charge apportée par l’inconfort.

Ensuite, lorsque vous vous apercevrez que sa main tombe sous la charge ressentie, assurez-vous auprès de lui que tout est sorti.

Dites-lui ensuite de réaliser deux grandes respirations, puis de compter jusqu’à trois. Au chiffre trois, suggérez-lui de se libérer de la charge qu’il perçoit en le lançant de toutes ses forces. Lancé ainsi, l’inconfort va franchir le plafond et arriver jusqu’au soleil ou être projeté au loin dans l’univers pour mourir ou fondre.

Enfin, terminez la suggestion en vous assurant que l’enfant ne perçoit plus l’inconfort dont il était question au début. Dans le cas contraire, n’hésitez pas à renouveler l’expérience. Mais lorsqu’il vous faudra demander la couleur de son inconfort, l’enfant devrait proposer une couleur autre que la précédente.

Variante :

Voici les variantes que vous pourrez proposer à la place de « jeter l’inconfort de toutes ses forces » :

· Lui demander de broyer l’inconfort avec sa deuxième main et ensuite se laver les mains pour s’en libérer.

· Pour les enfants de moins de 7 ans, n’hésitez pas à faire appel à son héros/héroïne préféré(e) pour que celui-ci détruise l’inconfort.

Le jeune client devra être capable de refaire cet exercice chez lui s’il en ressent la nécessité. Cet exercice est surtout recommandé aux enfants qui ont besoin d’une anesthésie.

Suggestion du « comme si… »

En créant un univers extraordinaire où tout est possible pour l’enfant, vous avez la possibilité de l’aider à trouver des alternatives à son inconfort. Mais afin de stimuler son imagination et vous éloigner de la répétition du réel, vous devez utiliser les termes « comme si » dans votre discours.

Exemples :

« C’est comme si tu étais une jolie petite tortue… qui va se diriger lentement mais sûrement, vers la salade qui est placée devant elle… Elle marche à son rythme… Et accède peu à peu à son objectif… un pas à la fois … elle garde sa motivation et poursuit son chemin. »

« C’est comme si… un matin tu te réveilles et tu examines ta main … tes ongles … Ils ont la longueur qu’il faut… tu es ravi car pour toi ils sont beaux … J’aimerais savoir ce que tu as fait pour les faire pousser ? »

Suggestion par la personnalisation

L’objectif est de lui permettre de percevoir la situation dans laquelle il se trouve sous un autre point de vue. L’idée est donc d’inviter l’enfant à se visualiser à la place d’une autre personne ou d’une partie de son corps afin de trouver des solutions adaptées.

 Exemples :

« Tu es ton ventre… Dis-moi ce que ton ventre ressent… »

« Tu es un super héros … Dis moi ce qu’il veut faire pour aller mieux … »

« X, tu as maintenant 10 ans … Dis moi ce que X fait pour arrêter de sucer son pouce ? « 

« Tu es un chat … Que fait le chat quand il a peur ? »

Grâce à sa démarche amusante et ludique, c’est une méthode qui marche particulièrement bien auprès des jeunes enfants. Et, plus ils sont portés par le jeu des personnages, plus les résultats seront positifs. Elle est idéale pour les jeunes clients qui ne portent pas encore de jugement de valeur (sur leur physique ou leurs compétences).

Suggestion de communication

Ici, vous allez demander au jeune client de communiquer directement avec son problème

Exemple : « Tu avances vers ta vessie … et à ce moment-là tu prends la décision de lui dire quelque chose … de lui demander quelque chose … parle lui ».

Suggestion d’un monde imaginaire

Ici, l’intérêt porte sur un problème qui existe vraiment dans le monde imaginaire de l’enfant. Et pour le résoudre, il est nécessaire de le rectifier et d’en faire une solution adaptée à la fois au monde imaginaire et au monde réel.

Par exemple : Devenir invisible pour prendre les jouets de son frère n’est pas une solution car cela ne peut être réel. Mais, bénéficier du pouvoir d’invisibilité peut également être traduit par le fait d’avoir le pouvoir d’être bien avec soi-même.

L’objectif pour le thérapeute est donc d’orienter le ressenti de l’enfant vers le positif. Ainsi, le jeune client aura l’impression de contrôler ce qu’il vit parce qu’il est lui-même à la base de ce monde imaginaire qu’il connaît bien.

Commencez par lui demander de se visualiser dans un univers où il dispose de pouvoirs magiques. Puis invitez-le à vous apporter les détails de ses pouvoirs. Grâce à ses propos, l’enfant fournit lui-même les solutions à son problème. C’est une technique qui s’avère infaillible dans plusieurs cas.

En général, les enfants adorent s’identifier à leurs personnages de fiction préférés (les super-héros par exemple). Ce qu’ils souhaitent par-dessus tout, c’est d’avoir leurs superpouvoirs. Au thérapeute alors de leur expliquer que ce souhait ne pourra être satisfait qu’en fermant les yeux et en glissant dans le monde imaginaire. Le jeune client doit comprendre que ce pouvoir (Exemple : avoir un bouclier protecteur, se rendre invisible, voler …) ne peut être acquis en restant dans le monde réel. Alors, invitez-le à entrer dans le monde imaginaire. Lorsqu’il vous raconte ce qu’il perçoit, demandez-lui de vous décrire ce qu’il ressent à ce moment-là. Vous pouvez également lui dire de parler à son super-héros afin de lui demander ce qu’ils peuvent faire ensemble pour résoudre son problème.

Suggestion du personnage ressource 

Ici, l’idée est d’amener l’enfant à comprendre qu’il a le pouvoir de s’adresser directement à son personnage fantastique préféré autant de fois qu’il désire se confier. Ce personnage peut prendre la forme d’une fée, d’un sorcier, d’un magicien, d’un gardien, d’un animal magique, d’un dragon, d’un chaman, d’un chef indien etc. A l’enfant de choisir lui-même ce personnage, qui sera une sorte de figure parentale idéale. Appelé « personnage ressource », ce personnage sera caractérisé par des traits positifs tels que la confiance, la joie de vivre, l’adaptation et la réussite.

Il n’est pas rare qu’en grandissant l’enfant change de personnage ressource. Mais le principe même de « personnage ressource » restera à jamais dans sa vie. Le personnage grandira en même temps que lui, sera présent à chaque étape importante de sa vie et continuera à acquérir des compétences qui lui seront utiles.

Ce personnage ressource servira de confident à l’enfant, il l’aidera dans les problèmes de sentiment d’abandon, sentiment de ne pas être entendu, compris, rassuré… Ce personnage va permettre à l’enfant de ne jamais se sentir seul.

Combiner les modèles de suggestions

Vous pouvez combiner les modèles de suggestion afin d’ajuster au mieux votre discours hypnotique.